World Wildlife Day

Pourquoi une Journée Mondiale pour la Vie Sauvage ?

La Journée Mondiale de la Vie Sauvage a lieu tous les ans le 3 mars. Elle est l’occasion de faire le point sur ce qu'il reste de la vie sauvage dans notre monde contemporain et de poser la question de la place que nous lui laisserons dans le futur. 

Les espaces vierges représentent désormais moins d'un quart de la surface terrestre et moins de 10% de la surface océanique

Bien que la vie sur Terre existe depuis plus de 4 milliards d’années, ce que nous en percevons aujourd’hui a été largement impacté par l’action de l’homme, et ce depuis 10 000 ans. L’homme a domestiqué la nature, la vie sauvage et ses espaces, principalement pour des fins utiles, en particulier pour se nourrir. Le loup a été le premier animal sauvage domestiqué il y a 15 000 ans, donnant naissance à la famille des chiens. Et les bovins descendent d’aurochs sauvages du Moyen-Orient, domestiqués il y a plus de 10 000 ans, une époque qui coïncide avec l’apparition de l’agriculture. Aujourd’hui, c’est un tiers de la surface mondiale qui est aménagé pour l’agriculture.

Les espaces sauvages, dits également vierges, n’ont depuis cessé de reculer. On estime qu’ils représentent désormais moins d'un quart de la surface terrestre, dont 8% pour les forêts primaires, et moins de 10% de la surface océanique. Or ils constituent les habitats de la vie sauvage, et leur réduction entraînent mécaniquement une disparition d’une partie de la faune et de la flore qui en dépendent. En 40 ans, ce sont la moitié des animaux sauvages qui auraient disparu.

Pourtant les besoins de l’homme ne cessent de croître. Il faut nourrir une population de plus de 7 milliards de personnes, en croissance nette de plus de 240 000 personnes par jour. D’ailleurs ce sont 65 milliards d’animaux qui sont tués chaque année pour fournir 323 millions de tonnes de viande. Les besoins croissants liés à la croissance démographique et économique exercent une pression continue sur ces espaces et donc sur la vie sauvage. Les zones de pêches sont ainsi passées de 60% à 90% de la surface océanique en 70 ans et plus de 30 millions d’hectares de forêts primaires ont disparues ces 30 dernières années. Quel avenir pour la vie sauvage face à cette pression continue ?

Une vie sauvage condamnée à l’extinction ?

Les menaces liées aux activités humaines, dont l'exploitation des ressources (légales et illicites), la dégradation des habitats, le changement climatique et la pollution, représenteraient plus de 90% des menaces pour la faune dans le monde selon un rapport du WWF.

Mais plusieurs mesures existent pour mitiger chacune de ces menaces. Ainsi la lutte contre le braconnage, qui rapporterait selon les Nations Unies 23 milliards de dollars par an, permettrait d’améliorer le sort d’espèces en danger voire en voie d’extinction : les éléphants, les rhinocéros dont la corne vaut entre 40 000 et 50 000 euros le kilo, soit plus cher que l’or, mais aussi les pangolins, les tigres, ou encore les ours.

La lutte contre la pollution des déchets plastiques en mer permettrait de sauver jusqu’à un million d’animaux maritimes, actuellement victimes des quelques 150 millions de tonnes de déchets plastiques présents dans les océans.

Des modèles de production plus durables et responsables existent dans la plupart des secteurs qui génèrent des externalités potentiellement négatives sur la biodiversité. Leur mise en pratique à grande échelle doit passer par la sensibilisation de l’ensemble des acteurs, y compris les consommateurs, mais aussi par une volonté politique forte. Si on prend l’exemple de la pêche industrielle, interdire le chalutage profond (cas de l’UE depuis 2017) et faire respecter la législation sont des leviers importants. Autre levier pour la protection des écosystèmes marins : la fin des subventions et incitations diverses (notamment sur la fiscalité du carburant) qui encouragent la flotte de certains pays à aller à des milliers de kilomètres de leur port d’attache (cas de la Chine, de Taïwan, de la Corée du Sud et de l'Espagne).

Célébrer et protéger la Vie Sauvage

Pourquoi célébrer et protéger la vie sauvage ? D’abord parce qu’on en dépend plus qu’on ne le pense. Certes l’homme a domestiqué une grande partie de la nature, et a créé tout un pan de la biodiversité utile à ses activités, mais il n’en reste pas moins que les espaces et les formes de vie sauvages lui procurent de nombreux services, notamment écologiques, difficilement remplaçables.

Par exemple les forêts primaires, véritables « puits de carbone », absorbent beaucoup plus de CO2 que les autres forêts. Elles sont également qualifiées de « niches écologiques » car elles abriteraient 75 à 90% de la biodiversité mondiale. De manière générale, les espèces sauvages assurent un équilibre dans leur écosystème, une forme de régulation naturelle des effectifs des espèces, qui in fine bénéficient à l’homme.

Et il nous reste encore beaucoup à apprendre de cette biodiversité. 2 millions d’espèces ont à ce jour été identifiées, et on estime que le nombre d’espèces sur Terre se situe entre 5… et 100 millions. La taxonomie, discipline scientifique consistant à compter et classer les espèces, évolue ainsi sans cesse. Près de 20 % du travail d’identification des espèces aurait déjà été réalisé. Les découvertes de nouvelles espèces ont des applications dans des champs très variés, comme celui de la santé, de l’agriculture ou encore de la conservation.

Par exemple, ce qu’on pensait ne constituer qu’une seule et unique espèce de moustique porteur du paludisme s’est révélé comme étant constituée d’au moins sept espèces différentes. Or ces espèces bien qu’elles peuvent se ressembler, ne se croisent jamais et différent dans leur comportement et leur habitat. Comprendre leur capacité de transmettre le paludisme peut ainsi sauver des millions de vies.

Autre exemple : récemment les scientifiques ont découvert que les éléphants africains ne proviennent pas d’une seule espèce, mais de deux espèces distinctes : l’éléphant de la savane et l’éléphant de la forêt. Cette découverte a permis d’améliorer les mesures de conservation, en évitant notamment de continuer à transférer les éléphants de la savane dans la forêt, un habitat qui leur est étranger.

Bien qu’on ne soit qu’au début d’une transition vers des modes de production et de consommation plus durables, et donc avec un impact positif sur la vie sauvage, on peut déjà se réjouir des efforts de conservation déjà réalisés :

Il nous appartient donc à tous, hommes politiques, chefs d’entreprises, consommateurs, scientifiques, simples citoyens, et autres acteurs de la société civile, de réfléchir et de définir la place que nous souhaitons laisser à cette vie sauvage dont nous ne cesserons de dépendre.

Aina Rakotoarisoa